La génération Z arrive dans les entreprises. Entre appréhensions et stéréotypes, on lui prête beaucoup de traits de caractère : rejet de l’autorité, individualisme, voire superficialité et manque de concentration… La réalité est à la fois plus complexe et plus stimulantes. Par leurs attentes, par leur approche du travail et de l’entreprise, la Gen Z apporte aux organisations un vent de renouvellement dont il faut savoir profiter.
La génération Z a-t-elle vraiment des attentes spécifiques ? Dans un précédent article, nous avons évoqué les spécificités de ces "Digital Natives", nés entre 1995 et 2010, en matière d’apprentissage et de formation. Il en ressortait notamment une appétence particulière pour le distanciel et l’apprentissage en autonomie, alliée à un équilibre avec le présentiel, et une forte valorisation de la compétence et de la formation en général. Retrouve-t-on des particularités en matière d’attentes vis-à-vis du travail ?
Il n’est pas forcément facile de différencier l’effet « nouvelle génération » (les traits propres à toutes les nouvelles générations à travers les âges) et l’effet spécifique « Gen Z » (les traits propres aux générations 1995-2010) : cela suppose des enquêtes par âge comparables au fil du temps, et ces données sont rares.
Mais deux faits sont établis : 1) les attentes vis-à-vis du travail de l’ensemble des actifs ont évolué, et 2) celles des jeunes sont en moyenne différentes de la moyenne générale. On peut donc raisonnablement considérer que la Gen Z apporte vraiment quelque chose de nouveau.
A l’échelle mondiale, la Gen Z apparaît sensiblement plus exigeante en matière de conditions de travail. L’étude Randstad workmonitor 2023 nous apprend que 58% des 18-24 ans quitteraient leur travail s’il les empêchait d’apprécier leur vie, contre 40-41% des actifs de 45 ans et plus. 38% des jeunes ont déjà quitté un emploi parce qu’il entravait leur vie personnelle, contre un quart des seniors. Un sur deux n’accepterait pas un travail qui ne permet pas de flexibilité horaire, contre 2 sur 5 dans les tranches d’âge supérieures ou égales à 45 ans.
Les jeunes de la Gen Z sont également plus regardants quant au sens du travail. 52% d’entre eux, contre 37% des 45 ans et plus, n’accepteraient pas un emploi si les valeurs RSE de l’employeur n’étaient pas alignées avec les leurs. Et 61%, contre la moitié des 45 ans et plus, quitteraient une entreprise dans laquelle ils ne se sentent pas à leur place.
Toujours à l’échelle globale, selon un rapport du Forum économique mondial (cité par le New York Times et le Courrier International, la génération Z serait celle qui « valorise le salaire moins que toute autre génération et considère le travail à distance comme une priorité absolue ». Le salaire reste important, mais il n’est plus la seule motivation.
La France, sur ces sujets, ne fait pas exception, et les chiffres concernant les jeunes Français dessinent les mêmes tendances. Une récente étude OpinionWay pour SKEMA et EY, concentrée il est vrai sur les étudiants et diplômés des écoles d’ingénieurs et de commerce, identifie le besoin de cohérence comme la ligne directrice des nouveaux arrivants sur le marché du travail : cohérence entre leur travail et leur vie personnelle, entre leurs valeurs et celles de l’entreprise, entre leurs attentes et ce qu’ils trouvent dans le travail. C’est suivant ces lignes directrices qu’ils entendent construire leur propre parcours, loin des logiques institutionnelles de carrière et de fidélité à un groupe.
Souvent décrite comme individualiste, la Gen Z se définit plutôt comme attachée à son autonomie. Dans l’étude citée ci-dessus, 77% des jeunes considéraient comme important de travailler dans un esprit d’équipe constructif, et 68% souhaitaient une ambiance de travail qui leur permette de s’épanouir. Ce n’est pas là une attitude individualiste.
Selon Élodie Gentina, professeure à l'IESEG School of Management et spécialiste de la génération Z, les jeunes issus de cette dernière « ont besoin d’autonomie dans leur travail davantage que d’indépendance ». 8 sur 10 Un sur deux « souhaite avoir un manager », à condition qu’il s’agisse d’un « manager coach ». Pour l’expert, il s’agit là d’un changement sociologique profond, lié au fait que les jeunes de la Gen Z ont grandi dans des familles plus horizontales et plus démocratiques, moins fondées sur l’autorité verticale et davantage sur la co-construction de solutions.
La Gen Z est en demande de cadre, mais d’un cadre qui donne du sens plutôt que des ordres. Elle est prête à s’engager dans un projet d’entreprise, mais son engagement n’est pas inconditionnel.
D’un point de vue managérial, ces attentes sont très vertueuses. Elles obligent à rechercher un management plus inclusif, qui convainc plus qu’il ne contraint, qui vise à rallier les énergies autour d’un projet plutôt qu’à distribuer des tâches sans trop les expliquer, pour ensuite en contrôler minutieusement la réalisation. Ce management par le sens se double d’un management en mode « coach », qui vise à l’empouvoirement et non à la discipline. Plus difficile à mettre en process, ce mode de management est aussi bien plus générateur d’expérience collaborateur améliorée, d’engagement au travail et donc de performance.
Pour Élodie Gentina, « l’entreprise ne doit pas se contenter de répondre à des attentes, mais doit être proactive. Par exemple, il est avéré que si les process de recrutements sont trop fastidieux, les jeunes ne vont pas au bout du parcours. » Le recrutement est un moment-clé, mais la remarque est vraie de l’ensemble des processus internes de l’entreprise, RH, administratifs et opérationnels. Le développement des compétences est notamment un levier-clé de l’engagement pour la Gen Z, justifiant un management des talents attentif et des outils numériques performants.
Habitués à des solutions numériques intuitives, ergonomiques, qui parlent d’elles-mêmes, les jeunes de la Gen Z risquent de montrer moins de patience que leurs aînés avec les procédures qui leur paraîtront inutiles ou redondantes. Parfois, ils auront tort et il faudra le leur expliquer. Parfois, ils auront raison, et ce sera une occasion pour l’organisation de progresser. Dans tous les cas, les équipes auront besoin de managers « coach », capables d’inspirer l’adhésion par l’échange et l’expertise humaine plus que par l’autorité statutaire.
En abordant les jeunes de la génération Z, gardons en tête qu’il s’agit avant tout d’individus, dans toute leur diversité. Les résultats des enquêtes générationnelles sont là pour expliquer certains comportements lorsqu’ils surviennent, mais ils ne doivent pas servir à mettre les jeunes dans des cases. Dans tous les cas, le léger décalage que chaque génération apporte au monde de l’entreprise fait partie des leviers importants du changement et du renouvellement des pratiques. Et c’est du dialogue entre collaborateurs d’âge, mais aussi d’origines, de caractère, de cultures diverses que naissent souvent les innovations. La Gen Z apporte un regard neuf sur le digital qui aide l’entreprise à préfigurer les usages de demain. Et elle précipite l’avènement du manager « coach », acteur du renouvellement de l’organisation.
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