Les performances d’une entreprise dépendent directement du niveau de compétences de l’ensemble des collaborateurs impliqués dans la production, qu’ils soient salariés de l’entreprise ou non. Un produit, un service, est fourni par une communauté d’individus et de structures, liés au donneur d’ordre aussi bien par des contrats de travail que par des contrats commerciaux (sous-traitance, partenariat, prestation freelance). Comment garantir la circulation des connaissances et des compétences ? Peut-on pousser les murs du LMS pour inclure davantage de monde ? Bien sûr ! Le cas d’Airbus, exposé lors d’un webinar animé par Michel Diaz (Féfaur) le 12 mai dernier, nous en offre une brillante illustration.
On ne présente pas Airbus, mais il est permis de rappeler quelques ordres de grandeur : il s’agit d’un groupe international présent dans 35 pays, qui compte plus de 130 000 collaborateurs de 136 nationalités différentes. Il est présent dans trois grands domaines d’activité : l’aviation commerciale, les hélicoptères, l’aérospatial / défense. Un groupe de cette taille, présent sur des métiers aussi divers et techniques, fonctionne nécessairement avec un grand nombre de fournisseurs et partenaires. Airbus compte ainsi 800 fournisseurs externes.
Les enjeux « compétences » de l’entreprise étendue chez Airbus
L’historique d’Airbus avec Cornerstone remonte à novembre 2016, date à laquelle la solution LMS est déployée pour la première fois au sein du groupe. Il s’agit à l’époque d’apporter aux collaborateurs la possibilité d’accéder à l’offre d’e-learning interne. En 2017, la solution est étendue à la gestion des formations en présentiel (catalogue, inscriptions, suivi…), puis, en 2019, aux classes virtuelles. Les collaborateurs ont ainsi accès à un catalogue de 17 000 offres d’elearning, auxquelles s’ajoutent les formations en présentiel et en classes virtuelles.
Jusqu’ici, c’est presque la chronologie « classique ». L’étape suivante a consisté à ouvrir un accès au LMS aux collaborateurs de l’entreprise élargie.
« L’idée d’élargir le LMS à l’entreprise étendue répondait à 3 préoccupations », analyse Livie Candotti, Product Owner de la solution Cornerstone au sein d’Airbus. La première est « l’harmonisation : auparavant, nous utilisions beaucoup de plateformes différentes, pour les collaborateurs, les fournisseurs et les filiales ». Il s’agissait de remplacer cette diversité par un outil unique. Le 2e objectif était de mettre en place « des process robustes et une continuité de service à destination de l’entreprise étendue ». Le 3e enjeu portait plus généralement sur la digitalisation de l’entreprise : étendre le LMS permet de promouvoir la relation distancielle, à la fois RH et formation, entre l’écosystème et le groupe.
Pour quelles cibles ?
Deux publics de l’entreprise élargie sont plus particulièrement ciblés. Le premier est composé des filiales restées autonomes dans leur gestion. Le second rassemble les fournisseurs.
En ce qui concerne la première cible, Livie Candotti nous explique que « certaines filiales sont complètement intégrées à notre SIRH et utilisent l’ensemble de nos process RH ». Leurs collaborateurs avaient donc déjà accès au LMS. Mais « d’autres filiales, suite à des choix de gouvernance et de stratégie, ne sont pas entièrement rattachées à notre SIRH. Elles disposent de leur propre outil RH ». Pour que leurs collaborateurs puissent bénéficier de l’offre globale de contenus de formation proposée par le groupe, l’accès au LMS a été étendu aux collaborateurs de ces filiales.
Pour ce qui est de la seconde cible, celle des fournisseurs externes, la problématique est un peu différente. Il s’agit de faire en sorte que les collaborateurs de ces entreprises « puissent être formés à nos process obligatoires », explique Livie Candotti. En préalable à toute mission au sein des entreprises du groupe, les partenaires doivent en effet maîtriser un certain nombre de compétences et obtenir des certifications obligatoires. « Les entreprises externes ont l’obligation de faire suivre ces formations à leurs collaborateurs. Mais la certification elle-même reste du ressort de ces entreprises ».
À ces enjeux de conformité s’ajoute un autre sujet juridique : le fait « d’utiliser une plateforme LMS dédiée à l’extended entreprise permet de s’assurer qu’on ne puisse pas requalifier les collaborateurs des fournisseurs en collaborateurs internes ». Les fournisseurs ont accès aux formations pour leurs salariés, mais c’est à eux que revient la responsabilité du suivi et de la certification. Le LMS est un moyen de renforcer les liens et l’efficacité du développement des compétences tout en actant la nature partenariale de la relation.
Pour Airbus, le LMS étendu répond donc à deux besoins distincts : permettre aux collaborateurs des filiales les moins intégrées d’accéder au catalogue et notamment au socle de compétences commun aux salariés d’Airbus ; et donner aux collaborateurs des fournisseurs externes un accès à un catalogue restreint de formations nécessaires à leur intervention au sein du groupe. Il s’agit là de deux cercles différents, avec des périmètres d’utilisation distincts.
Comment accède-t-on au LMS étendu ?
Livie Candotti nous donne un aperçu du fonctionnement de la solution Cornerstone appliquée à l’entreprise étendue. Dans chaque organisation concernée, l’accès à la solution Cornerstone s’effectue par le biais du « Training Focal Point » (TFP). Il s’agit d’un collaborateur de l’entreprise filiale ou partenaire, généralement issu du service RH. Ce salarié joue le rôle de porte d’entrée dans le système.
- Inscription sur la plateforme : Initialement, « le TFP envoie un lien aux collaborateurs, qui s’enregistrent manuellement. »
- Consultation de l’offre : « Une fois le compte activé, ils peuvent faire une recherche de formation sur le catalogue qui leur est rendu visible »
- Accès aux formations : Le TFP gère ensuite « le booking, l’achat et l’assignation des formations disponibles ».
Les collaborateurs sont donc « autonomes sur la recherche de la formation, mais pas sur la consommation elle-même ». C’est le TFP qui réalise « l’achat de siège », puis l’assigne au collaborateur. S’il s’agit d’elearning, l’apprenant pourra dès lors consommer l’offre depuis son propre PC lorsqu’il le souhaitera, puis évaluer la prestation. Si la formation se fait en classe virtuelle, la suite du processus est gérée en interne au sein d’Airbus, suivant la procédure habituelle. Là encore, l’apprenant peut évaluer la formation à chaud.
Le TFP gère donc la création de compte, puis l’achat de formation, qui doit être suivi de l’assignation du collaborateur à la formation choisie. Tout « siège » non assigné dans la journée est remis à disposition le lendemain. Le TFP peut en outre supprimer une participation à une session de classe virtuelle ou encore remplacer un utilisateur par un autre. Les fournisseurs comme les filiales sont autonomes dans leur gestion de l’accès aux formations via le LMS.
La gestion de parcours en blended
Avec la pandémie, les formations en présentiel ont connu un coup d’arrêt, et la classe virtuelle a le vent en poupe. « En central, au moment de la crise, nous avons transformé rapidement du présentiel en virtuel », précise Livie Candotti. Des prestations « très appréciées » dans l’entreprise étendue, notamment dans les filiales, afin de réaliser des économies de transport et générer plus de flexibilité. Chez Airbus comme ailleurs, la crise sanitaire a joué le jeu du digital et du distanciel.
Le LMS permet par ailleurs de combiner les différentes modalités – elearning, classe virtuelle, présentiel – en un parcours « blended » personnalisé, grâce à l’outil « curriculum ». « Il existe par exemple un curriculum « compliance », qui correspond au socle de formations obligatoires à suivre pour tous les employés », et qui est ainsi rendu accessible aux salariés des filiales. Ce cursus mêle classe virtuelle ou présentielle avec des modules elearning. Les parcours en blended sont également très utilisés « sur le secteur production ».
Mais comment amener la formation aux collaborateurs ? Là encore, un outil intégré au LMS permet de promouvoir un véritable marketing de l’offre : c’est l’outil « playlist ». Le groupe peut ainsi pousser des contenus auprès de publics ciblés. La bannière et le carousel de la Learner Home permet également de communiquer sur les formations.
Au-delà de certaines requêtes techniques – notamment, Airbus aimerait pouvoir nommer plusieurs TFP par structure – l’outil Cornerstone « répond globalement à notre contexte et au besoin client ». Il unifie la gestion de la formation pour les collaborateurs internes et ceux de l’entreprise étendue, permet de panacher les modalités pédagogiques et propose un « process de booking très robuste ». Alors, comment faut-il s’y prendre pour conduire avec succès un projet de ce type ? L’important est « de se poser les bonnes questions, de savoir précisément à quel besoin vous cherchez à répondre », affirmait Livie Candotti en conclusion de ce webinar. Chaque entreprise a son écosystème et ses problématiques de compétences propres. Le LMS ouvre des possibilités nouvelles en matière de diffusion de contenus : à chaque organisation de saisir les opportunités offertes.
Dans un prochain article, nous donnerons la parole à Stéphane Amiot, Area Vice President EMEA chez Cornerstone, spécialiste de la formation dans l’entreprise étendue, pour une approche plus globale du sujet.