Un mot revient beaucoup dans notre quotidien au travail depuis quelques années : c’est le mot « empowerment ». Complexe et polysémique, on le traduit imparfaitement en français par « autonomisation » ou « responsabilisation » – même si on rencontre parfois « empouvoirement ». Dans son acception la plus simple, le terme renvoie à l’action de donner du pouvoir à un tiers. La crise sanitaire a conféré une actualité très concrète à ce terme, en mettant beaucoup de managers en situation de devoir faire confiance à leurs collaborateurs, de leur confier davantage d’autonomie. La pandémie aura-t-elle donné un coup de pouce décisif à l’« empowerment » dans les entreprises ?
Un enjeu d’engagement
L’empowerment est-il un phénomène de mode ou concept managérial d’avenir en France ? Il apparaît utile de resituer l’empowerment dans son contexte RH, là où il s’est implanté, pour comprendre son sens.
À l’heure où la globalisation rend les marchés toujours plus volatils, l’engagement des collaborateurs est devenu une préoccupation majeure pour les gestionnaires RH. Il y a quelques temps, une enquête Gallup de décembre 2017 avait fait grand bruit dans la sphère RH, en révélant que la France était en queue de peloton pour ce qui est de l’engagement au travail, avec seulement 6% de salariés « engagés ». Pourtant, selon le cabinet de conseil Korn Ferry, 74% des Français ont de l’intérêt pour leur travail – ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Dans le même temps, 73% d’entre eux sont déçus que leur entreprise ne leur propose pas d’initiatives qui développent davantage leur engagement et leur offre plus de responsabilité. Le cabinet Mozart Consulting et le groupe Apicil se sont efforcés de mesurer le coût du défaut d’engagement : ils l’évaluent en 2020 à 14 310€ par an et par salarié.
Il faut donc le rappeler : donner le pouvoir d’agir en milieu de travail est un facteur de réussite et de productivité ! Pour les collaborateurs, ce besoin d’autonomie tombe sous le sens dans notre économie transversale, mais de l’autre côté, les entreprises ont longtemps émis des réserves. En effet, beaucoup s’interrogent encore sur les besoins d’engagement de leurs équipes, et les façons dont l’on pourrait y répondre.
La crise, accélérateur d’empowerment
L'autonomie exige des dirigeants plus de flexibilité quant aux libertés accordées aux collaborateurs pour prendre des initiatives, et ainsi développer leurs propres projets. Un groupe de recherche révèle que l’empowerment et la responsabilisation encouragent les collaborateurs à s’impliquer davantage dans leurs projets au quotidien. Mais arriver à cette philosophie prend du temps - non sans mal - surtout chez les managers qui privilégient le contrôle et la supervision du travail.
La crise sanitaire a représenté un accélérateur de changement, à ce point de vue comme à bien d’autre. Les managers les plus rétifs à l’innovation RH ont eu plus de difficultés à faire face aux bouleversements liés au confinement que ceux qui étaient déjà engagés dans une démarche d’écoute des salariés et d’amélioration continue de l’expérience collaborateur (baromètre Parlons RH 2021, en partenariat avec Cornerstone).
A l’issue d’une période qui a profondément bouleversé les relations de travail, la question se pose en effet de façon encore plus urgente. Alors qu’une part importante des salariés a goûté au télétravail, il ne s’en trouve que 30%, selon une étude Elabe pour les Echos, pour souhaiter revenir à la situation antérieure. Les études réalisées pendant la crise montrent que le télétravail accroît la productivité, mais à condition d’être bien préparé. Dans le cas contraire, il peut la réduire significativement.
D’après le baromètre de la vie au travail réalisé par Viavoice pour La Mutuelle Familiale, les attentes principales des salariés pour l’après-crise sont la reconnaissance, la confiance et davantage d’information partagée. Autant d’éléments qui participent à l’empowerment. Celui-ci apparaît donc comme un des enjeux majeurs du management des années 2020, que ce soit pour attirer et retenir les salariés ou pour accroître la productivité.
Comment développer l’autonomie au travail des collaborateurs ? Comment favoriser l’empowerment ?
Promouvoir la diversité
Encourager les collaborateurs à gagner en autonomie passe par la construction d’un environnement propice aux interactions fluides. C’est pourquoi il est utile de constituer des équipes avec des profils différents pour permettre de nuancer les échanges et, ainsi, d’éviter que l’organisation ne se restreigne à une seule et même vision. À ce titre, il est important que la politique de recrutement de l’entreprise reflète cette démarche. Pour y arriver, les ressources humaines déconstruisent, dans certains cas, les idées reçues qui pèsent sur un secteur d’activité pour attirer des profils qui se distinguent des candidats habituels. Dans le domaine de la technologie, par exemple, un grand nombre d’individus perçoivent le secteur comme majoritairement masculin, très difficile à intégrer, avec des codes qui ne leur sont pas accessibles, sans même jamais avoir été confrontés à la réalité du secteur.
Au-delà des discours managériaux qui promeuvent les valeurs de diversité, il est primordial d’examiner la construction des offres d'emploi et de faire ressortir les messages qui décrivent le mieux la culture de l’entreprise. La présentation de l’entreprise donne-t-elle envie aux candidats de la rejoindre ? Le discours montre-t-il de véritables possibilités d'instaurer une atmosphère inclusive ou présente-t-il simplement une déclaration générale sur l'égalité des chances pour chaque offre d’emploi ?
Ce travail d’introspection permet à l’entreprise de mieux communiquer auprès de ses équipes et futurs collaborateurs, et ainsi d’atteindre ses objectifs de recrutement en favorisant une plus grande autonomie.
Anticiper et adapter sa stratégie face aux changements du marché
Souvent perçu comme un facteur déstabilisant, le changement permet pourtant à l’organisation de mieux s’adapter à son environnement économique. Ce type de situation pousse l’entreprise à développer une vision stratégique pour anticiper et gérer au mieux les évènements extérieurs, quelque soit leur nature. La crise sanitaire est venue illustrer ce point de façon magistrale : elle a été l’occasion de faire le point sur les pratiques managériales de l’entreprise, sur les enjeux de conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle, sur le sens à donner à l’activité de l’entreprise, sur l’autonomie des collaborateurs. Elle également montré de façon irréfutable que la transparence et l’écoute sont des éléments primordiaux en entreprise qu’il est utile d’appliquer tant du côté de l’opérationnel que du management.
Ajuster son style de management
La stratégie managériale de l’entreprise doit refléter l’engagement et la confiance accordés aux collaborateurs. Le manager parfait n’existant pas, il faut arriver à faire coexister les différents styles de management tout en définissant un socle commun de fondamentaux pour valoriser au mieux l’autonomie des collaborateurs.
On considère deux catégories dominantes de managers : le superviseur amical et le superviseur autoritaire.
D’un côté, le superviseur amical éprouve des difficultés à aborder les conversations difficiles et à faire preuvre d’honnêté par crainte de froisser ses collaborateurs. Un manque de communication qui, dans les situations complexes comme le licenciement, peut entrainer une incompréhension de la part du collaborateur concerné.
De l’autre côté, le superviseur autoritaire, lui, peine à tirer le meilleur parti de ses collaborateurs. Ici, ce comportement peut amener les collaborateurs à ne pas s’exprimer en cas de problèmes, lors de la réalisation de certaines tâches au quotidien par exemple, par peur d’être jugés. Ce management trop vertical et ce manque d’attention peuvent pousser d’excellents collaborateurs à quitter l‘entreprise et entraîner le turnover.
Dans les deux cas, le leadership de l’entreprise est questionné et les résultats de l’entreprise sont en jeu. Une étude récente a révélé que 40 % des collaborateurs qui sanctionnent le comportement et le travail de leur superviseur ont passé un entretien pour un nouvel emploi au cours des trois mois suivants, contre seulement 10 % de collaborateurs qui ont évalué positivement leur superviseur.
Souvent considéré comme une soft skill, le management reste une compétence complexe qui nécessite une formation et du perfectionnement. Pour une entreprise, placer les collaborateurs au cœur de sa stratégie est une manière de les fidéliser et, dans le même temps, de faire circuler les bonnes pratiques de management. Selon les contextes, les attentes et besoins d’une entreprise diffèrent. Il apparaît nécessaire de réfléchir et d’identifier les domaines à prioriser pour implémenter les transformations adéquates.
Il n’existe pas de remède miracle pour donner davantage d’autonomie aux collaborateurs. Par définition, l’empowerment n’est pas quelque chose que l’on peut imposer à une personne passive : c’est une alchimie par laquelle le salarié s’approprie les moyens et l’espace qu’on lui accorde, parce qu’il en a l’envie, parce qu’il est engagé. La crise sanitaire constitue une excellente occasion de remettre à plat les modes de management de l’entreprise, en utilisant les enseignements acquis sur le terrain au cours des derniers mois.
Publié initialement en octobre 2019, mis à jour en juillet 2021
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